25. Summertime Sadness
« La peinture ne paye pas assez ? Tu fais chercher des trésors à Marina ? »
« Dis tout de suite que je l’exploite ! Elle fait ce qu’elle veut dans son temps libre. Elle aime bien collectionner toute sorte de choses, c’est tout. »
« Une chance qu’il y ait bien plus que des graines et des cailloux ici. »
« Tu oublies les petits animaux. »
« C’est pas faux. »
« Tiens en parlant d’animaux, tu penses que la licorne m’a suivi ici ? Je n’ai pas vu de chevaux dans le coin. Et pas de chiens. Et pas de chats »
« Je doute que tu en vois très prochainement. »
« Pourquoi tu dis ça ? »
« Ils n’existent pas encore ici. »
« Tu as oublié des les recréer ? »
« C’est un peu plus compliqué que ça. Mais je ne doute pas qu’ils finiront pas revenir. Comme les saisons d’ailleurs. »
« C’est vrai qu’il fait tout le temps beau ici. »
« Profites-en tant que tu peux. C’est pas donné à tout le monde de pouvoir sortir sans réfléchir au temps qu’il fait. »
« Une première ! »
« Quoi encore ? »
« Vous avez invité une amie chez vous ? C’est bien la première fois que je vois ça chez toi. Vous ne receviez pas grand monde avant. »
« Ce n’est pas mon amie. Enfin pas encore. C’est une vieille amie de Marina. »
« J’espère que tu as été poli avec elle au moins. Tu pourrais la voir très souvent ici. C’est sain d’avoir quelqu’un de temps en temps. »
« C’est pas ma faute si tu choisis toujours des endroits isolés pour m’installer. »
« T’avais une super vue dans ton ancienne maison ! »
« La route n’arrivait même pas jusqu’à la maison. »
« Je trouve que c’était très bien comme quoi. La vue sur la ville en hauteur, le festival sur la colline à côté, la mer de l’autre. »
« J’ai une très jolie vue ici aussi. Et je pourrais même avoir un voisin si la maison en face ne restait pas désespérément vide. »
« Je n’avais pas trop le choix du terrain tu sais. Et j’avais envie d’explorer un peu Oasis Spring. Et le calme c’est bien aussi parfois. »
« C’est une façon de me dire que tu avais envie d’un peu de verdure ? »
« T’es perspicace ! »
« Tu devrais le savoir depuis. »
« Et tu réponds quoi à ça ? »
« Je réponds que tu es là et que tu n’en bougeras pas. Quand tu auras beaucoup d’argent tu pourras aménager ton jardin comme tu le souhaites. »
« Et c’est dans longtemps ? »
« Tout dépend de toi. Mais comme je vois que ton niveau en peinture est un peu plus élevé que dans l’autre monde, je pense que tu devrais t’en sortir pas trop mal. »
« Ah tu as remarqué ! »
« Je sais faire des compliments quand ils sont mérités. »
« Tu peux me répéter ton compliment, je ne suis pas sûr d’avoir bien saisi. »
« N’en profite pas non plus. »
« Tiens on dirait que votre amie est de nouveau là. Vous ne lui ouvrez pas ? »
« Chut, elle va nous entendre ! »
« Je te rappelle qu’il n’y a que toi qui m’entends. »
« Oui mais si tu m’énerves elle va m’entrendre. »
« Vous ne voulez pas la voir ? Pourquoi ? Qu’est-ce qu’elle a fait ? Elle t’a fait des avances ? »
« Non pas du tout. »
« Quel est le problème alors ? »
« Le problème ? C’est qu’elle est sans arrêt chez nous. On dirait qu’elle veut emménager ou je sais pas quoi. J’en peux plus. J’ai besoin de tranquillité de temps en temps. Après on se demande pourquoi je n’invitais personne avant. »
« Mais elle vient te voir toi ? »
« Non Marina. »
« Donc elle doit te laisser tranquille non ? »
« J’aimerais bien passer du temps seul avec Marina si tu vois ce que je veux dire. »
« Non pas tellement. »
« Tu le fais exprès ? »
« Peut-être ? »
« Tu m’énerves ! Et en attendant, c’est pas ça qui va faire avancer ma lignée. Tu peux pas la faire partir ? »
« J’aurais bien voulu t’aider mais je n’ai absolument aucun contrôle ces gens. »
« Vous vous cachez ici ? »
« Oui elle est encore à la porte. »
« Et tu penses qu’elle ne va pas faire le tour et voir de la lumière de ce côté ? »
« Apparemment non, vu qu’elle a pas quitté la porte. »
« Au moins vous prenez les choses calmement. Une bonne salade et un bon livre. »
« C’est mieux que rien. »
« Tu sais que vous pourriez être en train de faire ce dont tu parlais tout à l’heure ? »
« On voudrait pas faire trop de bruit. »
« Si elle vous embête tant que ça, pourquoi vous ne lui dites pas franchement ? »
« On ne voudrait pas la vexer. Enfin Marina ne voudrait pas la vexer. »
« Mais ça ne te dérangerait pas trop on dirait. »
« Je ne la connais pas plus que ça. Mais je ne voudrais que Marina perde une amie à cause de moi, alors je supporte en silence. »
« Silence, silence… »
« C’est toi qui me pose toutes ces questions. »
« Bon ça y est elle est partie ? »
« Finalement ! Je pense qu’elle est rentrée dormir. »
« Et elle ne s’est pas doutée que vous n’étiez pas là ? »
« Elle a du penser qu’on était partis en soirée à Willow Creek. »
« J’imagine que vous le saurez la prochaine fois qu’elle vous rend visite. »
« Ne parle pas de malheur. »
« Vous avez fait quoi en attendant qu’elle parte ? »
« J’ai suivi tes conseils … »
« Ah. Marina n’a pas l’air forcément très détendue, la performance n’était pas à la hauteur ? »
« Non, elle élabore un plan pour la prochaine fois qu’on veut éviter son amie en pendant que le diner réchauffe. »
« Elle a l’air de beaucoup l’apprécier si elle cherche déjà comment s’en débarrasser. Vu son regarde, je me méfierais. »
« Non mais parfois, y a des gens qui, même si tu les aimes bien, t’étouffe un peu et tu as besoin de respire. Tu te rends compte qu’elle est à notre porte matin, midi et soir. »
« Je me demande quand elle a le temps de s’occuper d’elle. »
« Je me pose la même question. »
« Il faudrait peut être lui trouver un homme. Ou une femme. Selon ses préférences. Remarque ça pourrait expliquer pourquoi elle est tout le temps chez vous pour voir Marina. »
« T’as un peu l’esprit tordu non ? On ne te l’a jamais dit. »
« Dernièrement tu n’es pas le seul. »
« Bien dormi ? »
« Ça peut aller. Mais ça irait mieux si les toilettes n’avaient pas décidé de lâcher de si bon matin. »
« Ce sont des choses qui arrivent couramment, tu devrais t’y habituer. Et puis ce n’est pas la première fois que tu as affaire à des toilettes récalcitrants. »
« J’ai vu mieux comme tâche pour commencer la journée. Et impossible de trouver le numéro d’un plombier dans l’annuaire. Tout ce qu’il y a est le service de nettoyage. »
« A propos de ça… »
« Oui ? »
« Non rien. »
« Tu allais dire quelque chose. Finis ! »
« Ce n’était pas important. Concentre toi sur ta fuite. Tu vas avoir besoin d’être au point sur ça. »
« Oui parce que tant qu’il y a pas de plombier dans le coin, je sens que ça va être pour ma pomme. »
« C’est bien, tu as déjà le bon état d’esprit. »
« Ben c’est quoi cette tête ? »
« Je sais pas, je suis soudait pris d’un coup de blues. »
« Mais il faut pas. Tu as un toit au dessus de la tête, une femme qui t’aime à tes côtes, des rentrées d’argent régulières, le soleil brille. »
« Ben je sais pas. Mon ancienne vie me manque. Ma femme, mon fils… Ma belle maison là bas. »
« Tu as oublié un détail. Tu étais mort là bas. »
« Mais si j’y étais encore, est-ce que ça me manquerait ? »
« Je serais bien incapable de te le dire. La mort est un mystère que personne n’a encore réussi à percer. Si il y a quelque chose à découvrir de plus. »
« J’ai entendu des histoires de fantômes. Tu penses que j’aurais pu revenir hanter ma famille et suivre leur évolution. »
« Arrête de penser à ce passé et concentre toi sur ce présent. Tu ne pourras pas avancer si tu continues comme ça. »
« Je ne peux pas m’empêcher de penser au passé. Les souvenirs sont encore bien présents dans ma tête. Tu aurais du tout effacer. »
« Si j’avais tout effacé, on aurait du tout recommencer toi et moi. »
« Souvenirs ou pas, je dois quand même tout recommencer. »
« Mais tu as toujours ton expérience d’avant, et tu es toujours l’homme que ces souvenirs ont forgés. »
« Si même Marina n’arrive pas à te consoler, je ne sais pas trop ce qu’on peut faire pour toi. Pourtant elle avait l’air plutôt enjouée quand elle est entrée dans la cuisine ce matin. »
« Je n’arrive pas à sortir de ce coup de blues. »
« Et si tu lui demandais ce qui la rend si joyeuse ce matin ? Peut être que ça pourrait changer ton humeur aussi. »
« Je sais pas. Tu sais j’ai envie de rien. »
« Interdit de me faire une dépression. »
« Je ne contrôle pas vraiment mes émotions tu sais. »
« Oui je sais, il y a pleins de facteurs qui rentrent en jeu. Mais il y a sûrement quelque chose qui peut te remonter le moral. »
« Je suis sûr que si quelqu’un peut trouver comment te remonter le moral, c’est bien Marina. Il y a une profonde connexion qui vous unit. Allez un petit sourire pour lui faire plaisir. »
« Je suis pas d’humeur. »
« Tu vas nous la faire déprimer aussi si tu continues comme ça. Ça risque de pas être très drôle pour la suite. Heureusement qu’elle semble imperturbable. Elle doit vraiment avoir une bonne raison d’être si heureuse. »
« Tu passes de triste à en colère ? Qu’est ce qu’elle a bien pu te dire ? »
« Je suis pas en colère, je suis méfiant. »
« Méfiant ? Elle est pas en train de t’annoncer qu’elle a rencontré quelqu’un d’autre quand même ? Remarque ça pourrait expliquer qu’elle soit si enjouée. Les effets d’un amour naissant. »
« Non mais ça va pas la tête ? Tu veux que je me mette vraiment en colère ? »
« Non pas vraiment. Voyons les choses du bon côté, au moins tu n’es plus triste. Et pourquoi donc fais-tu cette tête alors ? »
« Je veux me faire deviner quelque chose mais je ne suis pas sûr de comprendre. Et ça m’énerve un peu. Je n’ai pas envie de réfléchir ce matin. J’ai juste envie de retourner sous ma couette et d’y rester caché jusqu’à ce que ça passe. »
« Tu devrais peut être lui dire tout ça. Ça pourrait finir en mal entendu. »
« Et comment veux-tu que je lui explique sans lui parler de mon ancienne vie ? »
« Il faudra bien lui raconter tout ça un jour. »
« Aujourd’hui n’est pas le jour. C’est trop tôt et je sens que je vais m’écrouler si je lui parle de tout ça maintenant. »
« Tu pourrais juste lui dire que tu ne te sens pas bien et que tu as besoin d’aller te reposer. Je suis sûr qu’elle ne t’en voudra pas. »
« Serait-ce un sourire que je vois sur ton visage ? Une lueur d’espoir dans ton regard ? »
« Tu savais hein ? »
« Je savais quoi ? »
« Ce que Marina avait à m’annoncer ? Comment aurais-tu pu savoir autrement ? »
« Savoir quoi ? »
« Que ça allait me remonter le moral ! Suis un peu ! »
« Je n’avais aucune idée. J’ai juste vu qu’elle était très heureuse. J’espérais juste que ça soit contagieux. »
« Comment quelqu’un qui se prétend être un dieu peut ne pas être courant de certaines choses ? »
« Je ne prétends pas être un dieu, c’est juste que j’ai des moyens de tout savoir. Ce qui ne veut pas dire que je m’en sers. Et surtout pas avec ton entourage, par respect pour toi. Et pas avec toi non plus. Sinon je n’aurais pas besoin de discuter avec toi. »
« Tu avouerais donc que tu aimes bien nos conversations ? »
« Ce n’est pas une révélation, cela fait longtemps que je l’ai avoué. Je te mène la vie dure mais c’est parce que je t’aime bien. Enfin on ne vas pas avoir à nouveau cette conversation. Cela me rappelle de mauvais souvenirs. Bon et si tu me disais la bonne nouvelle ? Je veux sourire moi aussi. »
« Et bien… je vais être papa ! »